Je me suis embarqué vers les tristes rivages de cette "île" du bonheur fictif.
février
2013
- prix: 6,20 €
format : 100 x 170 mm
112 pages
ISBN: 978-2-84485-645-6 Existe aussi aux formats ePub et PDF
Extrait de "L'Ordre règne à Berlin"
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L’ordre règne à Berlin
Francesco Masci
"La grande apostasie culturelle a voulu tour à tour oublier, effacer et puis transformer le réel mais n’a su qu’offrir au sujet le loisir d'une liberté imaginaire et moralement déterminée. Aujourd’hui, pour la première fois, à l'échelle d'une ville entière, la promesse faite par la culture absolue de régler ses comptes avec le réel a été assouvie. La contingence des événements remplace alors la nécessité politique du 'lieu', l'ordre du nomos. À Berlin ce n'est plus seulement l'individu, mais une ville entière qui s'est égarée dans un domaine surinvesti par le narratif, laissant l'Histoire succomber à la quiétude infinie de la culture. Après avoir hanté les villes d'Occident, en se contentant de jouir de sa liberté fictive dans les interstices d'un réel duquel il avait, de toute manière, disparu comme unité significative, l'individu semble avoir trouvé sa cité idéale. Seulement, la ville où il a élu sa demeure n'existe plus."
Berlin est une ville entrée en apesanteur. Elle n'est plus aujourd'hui que le pôle sentimental d'un pèlerinage culturel alimenté par un folklore de la révolte et de la création. Jadis au cœur même de la guerre civile européenne qui a traversé la première partie du XXe siècle et qui y a laissé ses plus profondes blessures, Berlin est devenue l'avant-poste d'une capitulation généralisée à la fiction de l'individu autonome comme "forme abstraite toute prête", structure qui pourrait endosser tous les contenus. La subjectivité fictive a trouvé là l'environnement idéal aux épanchements festifs de son ego hypertrophié. C'est ici que la culture absolue, avec sa production d'événements interchangeables, a fini par se substituer entièrement à la densité politique du territoire, à ses contradictions, à ses oppositions latentes. L'ordre et l'obéissance s'y confondent alors avec la liberté et le chaos. Francesco Masci s'est embarqué sur cette "île", non pas pour explorer les mœurs et usages d’une nouvelle urbanité, mais pour entamer le deuil des promesses de liberté et d'émancipation de la tyrannie sociale faite à l'individu par la culture absolue.
Photographie de couverture : Michael Wesely.
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